21 Mar 2025

Le cri dans le désert (Matthieu 3,1-12)

Matthieu 3,1-12:

En ces jours-là, paraît Jean le Baptiste, qui proclame dans le désert de Judée : « Convertissez-vous, car le Royaume des cieux est tout proche. » Jean est celui que désignait la parole transmise par le prophète Isaïe : « A travers le désert, une voix crie : Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez sa route. » Jean portait un vêtement de poils de chameau et une ceinture de cuir autour des reins ; il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage. Alors Jérusalem, toute la Judée et toute la région du Jourdain venaient à lui ; et ils se faisaient baptiser par lui dans le Jourdain en reconnaissant leurs péchés. Voyant des pharisiens et des sadducéens venir en grand nombre à ce baptême, il leur dit : « Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ? Produisez donc un fruit qui exprime votre conversion ; et n’allez pas dire en vous-mêmes : “ Nous avons Abraham pour père ”, car, je vous le dis : avec les pierres que voici, Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham. Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres : tout arbre qui ne produit pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu. Moi, je vous baptise dans l’eau, pour vous amener à la conversion. Mais celui qui vient derrière moi est plus fort que moi ; et je ne suis pas digne de lui retirer ses sandales. Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et dans le feu ; il tient la pelle à vanner dans sa main, il va nettoyer son aire à battre le blé, et il amassera le grain dans son grenier. Quant à la paille, il la brûlera dans un feu qui ne s’éteint pas. »

Figure puissante et fascinante, celle de Jean Baptiste. C’est comme l’éclair qui traverse l’obscurité de la nuit, comme le tonnerre qui retenti dans le désert. Son message est chargé de puissance: «Convertissez-vous!», sa parole retenti en ce deuxième Dimanche de l’Avent et nous pousse à pratiquer l’introspection. De quoi ai-je besoin de me convertir ?
Les traits qui accompagnent le Baptiste s’avèrent bizarres à nos yeux, bien qu’ils soient attrayants pour tous ceux habitués à l’écoute de l’Ancien Testament.

  • Jean débute sa tâche dans le désert. Absurde! Ne devrions-nous plutôt marcher vers la grande place de la ville et crier de toutes nos forces notre proposition? Ne serait-il mieux parfois un centre de communication ? N’est-ce pas vrai que nous n’existons pas, à moins que nous ne soyons inscrits sur Google ? Or, si nous connaissons l’histoire du peuple d’Israël c’est tout à fait différent. Dieu l’avait conduit dans le désert lorsqu’il n’était qu’une poignée d’esclaves fugitifs, Dieu l’organise comme peuple en lui donnant la Loi dans le désert, Dieu le guide pendant des années de difficultés dans le désert. Les prophètes, après de siècles, parleront du désert comme l’endroit du premier amour, de la jeunesse de la relation amoureuse entre Dieu et son peuple; ils inviteront même le peuple infidèle à revenir au désert afin de récupérer la fidélité. Jean prêche dans le désert parce qu’il propose une rénovation, une nouvelle naissance, une conversion depuis la racine même de la personne.
  • Jean ne s’habillait pas à la mode, son vêtement étant de fourrure et sa ceinture de cuir. Le peuple attendait son retour comme précurseur du Messie, et Jésus même dira après que « Elie est déjà venu », en faisant référence à Jean.
  • Sa diète, pittoresque, de sauterelles et miel sauvage, est celle d’un nomade, de celui qui est de passage, de celui qui n’a pas d’habitation fixe, qui n’est pas établi, embourgeoisé. C’était nécessaire quelqu’un ainsi pour secouer la conscience du peuple, pour faire voir l’urgence de la conversion, pour exhorter au changement. Même aujourd’hui nous avons besoin de personnes qui soient capables de se déclasser, de quitter l’étroit entourage social où nous nous sentons tous mis et pouvoir regarder plus loin et voir d’autres personnes capables de nous permettre d’élargir l’horizon, personnes qui nous appellent à attendre le Seigneur qui vient, qui nous stimulent à préparer son chemin.

Jean a eu du succès. Matthieu nous dit que tous les habitants de Jérusalem venaient à lui, de toute la Judée, de la vallée du Jourdain…bref du monde entier. La voix qui avait débuté dans le désert devient fortement amplifiée par le désir de Dieu qui palpite en son peuple. Depuis de siècles qu’il n’y avait plus apparu un vrai prophète; les mouvements de l’époque normalement terminaient massacrés par les romains. Jean se présente comme un foyer d’attraction à travers de sa parole, de son témoignage, de l’urgence de son message.
Avec ces gens-là y arrivent aussi de pharisiens et sadducéens. Les pharisiens se montraient tellement insistants dans l’observance des lois concrètes, qu’ils oubliaient leur fondements : la justice en face de l’oppression, la pureté de vie et du cœur, l’humilité, la simplicité. Les sadducéens étaient un groupe de pouvoir, alliés d’Hérode, des romains et de n’importe qui si besoin y avait, pourvu qu’ils puissent garantir leur statu. C’est bizarre qu’ils aillent voir un homme qui annonce le changement, compte tenu qu’ils se sentaient très à l’aise dans un injuste système établi.
Par contre, Jean Baptiste ne mâche pas ses mots en dépit de sa figure peu attrayante. Il dit à n’importe qui ses quatre vérités et va directement à ce qui est l’essentiel : «Vous aussi, vous avez besoin de conversion. Ne vous faites pas d’illusions à cause de vos ancêtres, de votre famille, de la promesse que Dieu fit à Abraham, le père du peuple. Si vous tournez le dos à Dieu et à sa volonté, vous ne vous livrerez pas du jugement». Le message de Jean nous rappelle l’urgence des anciens prophètes, mais il insiste sur la proximité du Royaume. «Dieu est à la porte, convertissez-vous d’une foi pour toutes, avant qu’il ne soit trop tard». Il se sert de l’image de l’arbre qui va être coupé parce qu’il ne produit pas de bons fruits, aussi celle du feu où l’on brûle le bois inutile, celle du baptême avec l’Esprit et le feu et finalement l’image du grain que se vanne afin de le séparer de la paille inutilisable. À trois reprises fait-on allusion au feu, et toutes les images nous parlent de jugement, que Dieu va prendre un air très sérieux, bref que l’heure du discernement arrive.
Plus tard, Jésus reprendra un message plus précis. Selon lui, il faudra couper la branche inutilisable non pour arracher le cep entier mais pour qu’il produise de fruit davantage. (Jean 15,2). Il parlera aussi d’un baptême non de feu mais d’Esprit et de vie. Ainsi que de séparer le blé de la zizanie, mais seulement à la fin du temps, étant donné que le jugement revient à Dieu seul, pas aux hommes. (Matthieu 13,24-30).

Jean est en notre temps une personnalité pleine de bon sens. Son message passionné nous parvient chargé de fraîcheur et d’intégrité: «ne vous contentez-vous de suivre une vie médiocre, vivez plutôt dans la radicalité, allez à la racine ; c’est là que vous rencontrerez Dieu qui vient.». Son crie de conversion devient pour nous d’une actualité écrasante.

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